Dissipons tout-de-suite l'ambiguïté de mon titre qui pourrait induire certains en erreur, je veux juste parler de la panne de la delorean... Encore que cette dernière est fort justement connotée symbole phallique.
Oui, je ne peux m'empêcher de ressentir cette vieille angoisse sourde de la panne, quand je suis en delorean, que je transpose aujourd'hui sur mon réservoir d'essence en passant à la pompe dès qu'il atteint le quart de son volume - et ce, même pour faire une poignée de kilomètres !
Elle me vient d'une succession de vieilles guimbardes, achetées à prix modique inversement proportionnel aux déboires et malheurs occasionnés.
Elle a commencé très tôt, dans mon enfance, avec des stations sur le bord de la route, le tableau déchirant d'une famille échouée dans l'attente d'un sauveur, alors que le radiateur fait une fumée de tous les diables !
Et, adulte, pendant longtemps aussi, toutes ces voitures d'occasion dont on récite par coeur, sans être mécanicien, la titanie des pannes, courroie cassée, soit de distribution, ou de transmission, bielle coulée ou autres pistons défectueux, qui ne me disent rien mécaniquement mais sont synonymes d'emmerdements maximum et de réparations coûteuses.
Pendant longtemps, donc, je ne savais jamais si j'allais pouvoir partir ou pire, si je savais quand je partais, je ne savais jamais quand j'allais revenir !
Oui, parce que j'ai connu la perfide qui démarre du premier coup, qui me permet d'aller au supermarché, par exemple, et qui ne veut plus redémarrer quand le coffre est plein à craquer ! Alors, serrer les dents, recommencer en appuyant sur la pédale jusqu'au plancher, en murmurant : "s'il-te-plaît, s'il-te-plaît, démarre !", tout en sachant qu'il ne faut pas le faire trop longtemps pour ne pas la "noyer"... En fait de noyée, c'était moi, de larmes... surtout quand mes petits m'attendaient à l'école !
Il y avait celle dont la porte passager s'ouvrait dans un virage, ou celle qui semblait prise de la danse de saint Guy à cause d'amortisseurs défectueux, ou celle qui multipliait les pannes, de la plus anodine, comme la boite à gant ne pouvant rester fermée, au clic-clic-clic (ou clac-clac-clac) continuel du moteur annonçant une catastrophe imminente. Oui, parce qu'il y a aussi le mauvais numéro, la mauvaise série, le modèle qui enchaîne les problèmes de conception, tout-le-monde le dit, le constructeur lui-même l'admet, et, évidemment, il a fallu qu'on tombe dessus ! En plus, on sait qu'on ne pourra pas la revendre, pas la re-fourguer à plus benêt que soi, parce que ça ne se fait pas, quand même...
Il me venait de ces haines contre ces engins qui me mettaient dans la dépendance de leur bon vouloir alors que je n'avais pas le choix de leur échapper, habitant à la campagne ! Il me reste aussi des souvenirs nombreux de ces escapades gâchées qui me plongeaient dans des abîmes d'impuissance et de frustration !
Alors, oui, aujourd'hui, j'ai une voiture recente qui ne me cause aucun souci mais je garde toujours cette angoisse de fond, ce syndrome de la panne, inscrit au plus profond, qui me fait guetter le moindre bruit suspect ou ma jauge d'essence !
Mais j'ai aussi une espèce de soulagement et même de gratitude pour chacun de ses démarrages au quart de tour, même si c'est un peu idiot, je le reconnais bien volontiers.
Mais quel plaisir quand cela marche.
